Les dirigeants d'ETI, pionniers de la transformation digitale

Claire Gourlier, Co-fondateur de Kea-Euclyd & François Zoetlief, Senior Vice President chez Kea & Partners

Les ETI, terreau fertile de la transformation digitale

Premier vivier de création d’emplois en France entre 2009 et 2015, les Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI) comptent entre 250 et 5 000 salariés, avec un chiffre d’affaires inférieur à 1,5 Md€.
En 2018, on en dénombrait 5 800. Au-delà des chiffres, un profil-type s’impose au fil des enquêtes : une ETI, c’est une entreprise ancrée dans son territoire, détentrice d’un savoir industriel ou technologique unique qui lui permet aujourd’hui de conquérir des marchés à l’export.
Alors que l’on associe plus volontiers la « nouvelle économie numérique » aux start-ups et grands groupes, cette représentation donne une image imparfaite de la réalité. Les ETI prennent aujourd’hui la transformation digitale à bras le corps, avec à la clé, un nouvel exercice du métier de dirigeant ! Véritable clé de voûte de cette transformation d’entreprise, ce dernier doit à la fois initier, porter et guider.

40 dirigeants d’ETI témoignent :

Inspiré du voyage du héros, fil de narration mis en évidence par le mythologue américain Joseph Campbell, « l’Odyssée du dirigeant » – 1er livre blanc sur la transformation digitale, réalisé par et pour les dirigeants d’ETI – relate les 6 étapes clés du cheminement du dirigeant confronté à la réalité du digital :

Autant d’étapes clés racontées à partir de l’expérience éprouvée de 40 dirigeants d’ETI, couvrant une diversité de secteurs – de l’habillement à l’assurance, en passant par la distribution, les solutions informatiques, la santé ou le tourisme.

Au-delà de la diversité de leurs cheminements, au-delà des particularités propres à leur activité, leurs récits nous ont permis d’identifier les faits déclencheurs, les opportunités et réussites, les facteurs clés de succès mais aussi les principaux freins à lever.

Faits déclencheurs

Au-delà des facteurs exogènes, imposés par leurs marchés et leurs environnements (nouvelles technologies, menace de nouveaux entrants pure players, révolution des usages…), sur lesquels ils s’interrogent depuis des années, c’est bien souvent un élément déclencheur très personnel et singulier qui a provoqué le déclic : une learning expedition (MANUTAN, KERIA), une formation au digital (DECAYEUX), l’arrivée d’une nouvelle équipe dirigeante (HEPPNER, KAPORAL), la rencontre avec d’autres dirigeants (THOM EUROPE)…
Les convictions personnelles, voire viscérales, du dirigeant jouent ici un rôle central : sa conviction intime est, en quelque sorte, la pierre angulaire sur laquelle la transformation digitale prend son essor. Ils sont d’ailleurs nombreux à avoir évoqué un « avant » et un « après », une sorte « d’Euréka ».

Opportunités & réussites

Alors que le champ de la transformation digitale est quasiment sans limite et que les réussites touchent tous les fondamentaux de l’entreprise, certaines dimensions ressortent comme des catalyseurs ou des cas d’application de premier rang.

Sans surprise, et en particulier dans les entreprises de service et de distribution, la réinvention de l’expérience client a été la clé de voûte du plan d’actions. Proposer une expérience sans « couture », des services complémentaires et innovants pour répondre plus efficacement aux besoins de ses clients et les fidéliser est vu, par la quasi-totalité des ETI que nous avons rencontrées, comme le premier enjeu à traiter. Ex : création d’un site e-commerce chez THOM EUROPE, le Click & Collect chez NATURE & DÉCOUVERTES, le paiement en cabine chez ETAM, le CRM chez PIERRE ET VACANCES-CENTER PARCS.
Pour d’autres, la digitalisation du cœur de l’offre a été le moteur de la transformation. Elle touche le produit en lui-même et constitue une véritable remise en cause du business model, pour conserver son avantage compétitif ou faire face à de nouveaux entrants. Ex : la boîte aux lettres connectée par DECAYEUX, la création d’une business unit destinée à développer des jeux de société en ligne chez ASMODEEou encore la première selle connectée du marché pour LIM GROUP ou les ampoules connectées de KERIA.

Si l’optimisation du modèle opérationnel via le digital reste un axe d’investigation pour la majorité des répondants, il est plutôt préemptée à date par des ETI à caractère industriel (digitalisation de la supply chain, de l’outil industriel ou de la force de vente terrain…). Ex : Lab de LACROIX, automatisation des contrôles qualité des cartouches anesthésiques pour SEPTODONT.

Enfin, le digital constitue un puissant vecteur de modernisation pour l’image des ETI. Ex : ERAM ou GAUTIER.

Facteurs clés de succès

Comme un écho aux faits déclencheurs, les dirigeants rencontrés ont tous, sans exception, exprimé une première clé de succès : le facteur humain et l’attention particulière à accorder aux moyens et modes de travail. Si tous soulignent leur implication personnelle dans la transformation digitale, les retours d’expérience sur les modes d’organisation sont spécifiques et les recettes adoptées prennent des formes diverses. HEPPNER a fait confiance à son modèle décentralisé historique, en impliquant très en amont les directeurs de région et
d’agence dans le déploiement des nouveaux modes de fonctionnement, tandis que la transformation digitale d’ETAM a conduit à « l’horizontalisation » de l’organisation pour gagner en agilité et répondre à la vitesse du numérique.

La propagation d’un état d’esprit digital dans toute l’entreprise est remontée comme un point crucial. Cet état d’esprit se traduit à la fois par le fait que chaque collaborateur appréhende mieux les enjeux, les ingrédients et les impacts des nouvelles approches/ solutions mais aussi par le déploiement d’éléments culturels autour de l’agilité, la coopération, le droit à l’erreur, l’esprit start-up, la remise en question… dont la prise de décision du dirigeant constitue le premier symbole.

Enfin, le couple directeur général/directeur des systèmes d’information a également une responsabilité clé dans la réussite. La question de la remise en cause de leurs terrains de jeu a souvent été évoquée par les dirigeants d’ETI et elle est considérée comme majeure pour conduire avec discernement une transformation digitale au
bénéfice de toute l’entreprise.

Une seconde clé de succès particulièrement partagée est celle de l’articulation d’un bon timing – pour faire advenir cette transformation au bon moment – et d’une prise de risque relative – sans laquelle on ne progresse pas à la bonne vitesse ni avec la bonne intensité.

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