Trois histoires digitales inspirantes

Le 26 juin 2018, trois dirigeants nous ont inspirés en nous racontant le basculement opéré par leurs entreprises pour devenir des acteurs à part entière de l’économie digitale :

  • Albert Asseraf, Directeur Général Stratégie, Data et nouveaux usages chez JCDecaux,
  • Pierre-Olivier Brial, Directeur Général Délégué du Groupe Manutan International, et responsable de la commission digitale du METI (Mouvement des Entreprises de Taille Intermédiaire)
  • Guillaume Planet, Vice President Media & Digital Marketing Global du Groupe Seb.

Le débat était animé par le journaliste et chroniqueur, David Abiker.

Hervé Baculard, Senior Partner chez Kea & Partners, a d’abord rappelé les trois caractéristiques majeures des disruptions actuelles.

  • Tout d’abord, la violence concurrentielle : chaque entreprise doit désormais faire face non seulement à « sa » concurrence habituelle mais à de nouveaux acteurs qui attaquent les marchés de façon horizontale. D’où une question centrale : quel terrain de jeu choisir pour ne pas se faire terrasser, cultiver sa singularité et développer des atouts robustes pour demain.
  • Deuxième fait marquant : le déplacement de la valeur. Nombre de sociétés dites classiques l’expérimentent durement. À titre d’exemple, la distribution développe le « drive » en complément de ses magasins, avec des coûts supplémentaires mais le même volume de consommateurs. La création de valeur est donc relative, l’usage pour les clients domine tout et les comportements évoluent à grande vitesse. Il convient donc de savoir identifier de nouvelles sources de création et de migrer vers elles au bon rythme.
  • Enfin, le facteur humain : « À l’heure de l’intelligence artificielle, ce bon vieux facteur humain fait de la résistance, souligne ainsi Hervé Baculard. La mondialisation des années 1990/2000 aura finalement été un chemin assez facile : création de filiales dans toutes les géographies, développement des fonctions transverses, informatisation… Or, la digitalisation remet en question chaque métier et le code génétique de chaque activité. Elle prend finalement une dimension éminemment humaine. » Et de conclure : « C’est bien d’une transformation socio-digitale dont il s’agit. Digitale du fait de la technologie et sociale car chaque entreprise doit redéfinir son terrain de jeu au regard des mutations de la société, des comportements et des usages. »

MANUTAN INTERNATIONAL ET LE PROJET DREDA : « DES RACINES ET DES AILES »

David Abiker a lancé la discussion par cette question à Pierre-Olivier Brial : « Comme avez-vous fait pour que des entrepôts dans le 95 se transforment en une université et un projet de logistique HQE au service de vos clients : « Manutan With Love » ? Comment Manutan n’est pas devenu Les 3 Suisses du BtoB ? »
En guise de réponse, Pierre-Olivier Brial a tout d’abord brandi l’imposant catalogue Manutan de quincaillerie et matériel de bureau, comme témoin lourd et persistant de ce passage de la vente à distance à l’âge digital, à l’heure des actifs immatériels.
« Nous avons été amenés à repenser notre business model radicalement et rapidement, explique Pierre-Olivier Brial. Mais, au-delà d’une transformation digitale, nous avons cherché à refondre notre contrat d’entreprise autour d’une raison d’être « Entreprendre pour un monde meilleur » et à modifier notre culture en hybridant la relation humaine et la technologie. La conception de notre projet de siège social baptisé DREDA – acronyme « des racines et des ailes » – illustre parfaitement cette ambition. Pour changer et survivre ensemble, nous avons apporté à nos collaborateurs les moyens de se développer à titre individuel et de prendre leur destin en main. Pour réinventer la relation client et apprendre les bonnes pratiques digitales à nos équipes, nous nous sommes dotés d’une université interne qui travaille sur le rapport que chacun entretient avec soi-même, avec les autres et avec ses clients.
Nous avons également travaillé sur les comportements en matière d’innovation. Nous sommes passés de la culture projet à la culture du « Minimum Viable Product » et du « test and learn », inspirée de la Silicon Valley, en développant la capacité d’innovation de chacun. Les dispositifs d’écoute des collaborateurs et l’apport des démarches agiles sont bien plus efficaces pour basculer dans le digital que la création d’un ‘’Lab’’ déconnecté des métiers. Nous sommes désormais plus agiles, plus pragmatiques et… plus performants. »

JCDECAUX TRANSFORME SON OFFRE AVEC SA PLATEFORME MONDIALE DE PLANNING ET DE TRADING PUBLICITAIRE GONFLÉE AU MACHINE LEARNING

L’une des singularités du numéro 1 mondial des mobiliers et services urbains est d’être positionné sur un double marché. En amont, il s’agit de remporter les appels d’offres de longue durée (15-25 ans) lancés par les collectivités territoriales et les autorités de transport à travers le monde. En aval, il lui faut convaincre les annonceurs de financer des campagnes d’affichage dans une logique de court terme. Face à cette dualité temps court/temps long, le sujet de la digitalisation constitue l’un des enjeux majeurs de l’entreprise. « Loin d’être une source de déperdition de valeur, le digital vient enrichir notre métier, explique Albert Asseraf. Il permet de faire tomber les barrières de l’espace et du temps. La ville devient connectée et les messages intelligents. Les annonceurs peuvent ainsi diffuser un message différent d’un site à l’autre et selon les horaires, le tout nourri par exemple par leurs données de vente en temps réel. De quoi construire des campagnes programmatiques mais également calibrer cible et objet du message en temps réel. Preuve de cette montée en puissance : alors que seuls 6% de nos supports sont digitaux, ils représentent 18% de nos revenus. »

Autre sujet-clé : la data. « Nous disposons de plus de 1,2 million d’objets à travers le monde qui peuvent potentiellement produire des données, rappelle Albert Asseraf. Grâce à ces dernières, nous pouvons améliorer notre connaissance des villes, des annonceurs, la manière de proposer des publicités. À titre d’exemple, nos mobiliers peuvent être équipés de capteurs de pollution ou encore de mouvements de foule. »

Comme le digital dématérialise les transactions, JCDecaux a pris les devants, avant qu’un acteur de la nouvelle économie ne le fasse. JCDecaux vient donc de lancer ce 12 juin VIOOH, une plateforme programmatique mondiale de planning et de trading ouverte à toute l’industrie, en concurrence de la publicité digitale (mobile, recherche/search, écran…), transformant ainsi l’ensemble de son offre grâce à des campagnes optimisées par l’utilisation des données et de la technologie. Des algorithmes de Machine Learning améliorent le ciblage et l’efficacité des campagnes publicitaires. Une équipe de plus de 65 développeurs, codeurs, commerciaux et fonctions support basée à Londres pilote ce nouvel outil déployé en Europe mais aussi en Australie, à Dubaï, Hong Kong et Singapour.

QUAND SEB INVENTE LA COCOTTE MINUTE CONNECTEE

Groupe de dimension mondiale spécialisé dans la vente de produits grand public, Seb a su utiliser le digital pour renforcer ses capacités innovantes, mieux connaître son marché et nouer une relation intime avec les consommateurs. « Nous avions identifié nombre de signaux faibles qui nous ont permis de nous adapter, se rappelle Guillaume Planet. Nos acheteurs ont modifié leurs habitudes et se sont fortement digitalisés. Nous avons donc pris conscience qu’il fallait changer la chaîne de valeur au-delà de notre sens inné de l’innovation. Grâce à l’impulsion des managers, à l’implémentation d’un chantier de transformation digitale mais aussi à une démarche d’écoute et de proximité pour accompagner nos collaborateurs, nous avons progressivement basculé d’une culture produits à une culture clients. Le digital nous offre l’opportunité unique d’établir un lien direct avec nos clients. N’oublions pas en effet que le meilleur outil marketing demeure le bouche-à-oreille, aujourd’hui décuplé par les communautés sur Internet. L’objectif est également de placer la data au cœur de notre système marketing et de récolter l’information massive en provenance de la TV, du digital et de nos produits connectés. C’est à quoi nous voulons aboutir pour pouvoir développer une expérience personnalisée tout au long du parcours, que ce soit en amont ou en aval de l’achat. »

En conclusion, ce qui guide la réussite de ces trois entreprises, fleurons familiaux français

« Notre leitmotiv est simple : personne ne doit faire mieux que nous ce que nous faisons. » Albert Asseraf
« La réussite de la digitalisation tient avant tout dans l’investissement humain, le challenge étant de trouver les bons profils. » Guillaume Planet
« Notre réussite a également été portée par un actionnariat familial éclairé et prompt à prendre les décisions pour l’avenir. » Pierre-Olivier Brial

Kea & PartnersKea-Euclyd et Veltys

Building socio-digital transformation

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