Google, Amazon, Alibaba changent notre monde, à commencer par la construction automobile

Didier Long, co-fondateur de Kea-Euclyd

Michelin, le second manufacturier mondial de pneumatiques, né à Clermont-Ferrand en 1889 a eu dés le début une excellente idée : non seulement fabriquer des pneus de très haute innovation (invention du pneu radial, du pneu vert…) mais aussi se mettre dès ses débuts en 1900 entre l’automobiliste et la route via ses usages.

 

Cette obsession des usages de l’automobiliste s’est concrétisée par le guide rouge, sorte de manuel de la route, avec les meilleurs restaurants 3 étoiles le long du chemin (les fameuses étoiles Michelin), un rating des données et des usages… un siècle avant le Big Data… 35 millions d’exemplaires vendus, l’un des plus anciens et des plus prestigieux guides gastronomiques du monde.
UN guide mais aussi des cartes MICHELIN pour les vacances et les VRP,  avec des cartes pro pour tout réseau (exemple : EDF / photo), , et même les panneaux et les bornes MICHELIN sur toutes les routes de France.
Michelin n’était donc, non pas une manufacture de pneus à Clermont-Ferrand, mais une sorte de guide et de point d’entrée de la mobilité redescendant dans la chaîne de la valeur au plus près des usages clients, à partir de la production.

 

Google, porte d’entrée des usages et de la data de mobilité

Le problème pour les manufacturiers de pneus, de pièces détachées, ou les constructeurs automobiles c’est que Google a eu la même idée que Michelin. Toutes les grandes firmes mondiales de l’automobile se sont concentrées sur l’innovation, le marketing, la vente de produits… et les GAFA sont arrivés dans ce jeu en se concentrant non pas sur le produit mais sur les clients et leurs usages. Non seulement Google Map part de l’usage de la mobilité mais Android Auto, de la même firme, aussi.
François Michelin répétait toujours : « Le client a toujours raison ». La première valeur de Jeff Bezos est la même : « Client Obsession ». Ce dont Michelin rêvait avec ses cartes et les usages de mobilité, Google l’a fait.

 

La disruption des Data Mega Players

Avec Android auto qui cumule et analyse mes données, j’accède en recherche vocale tactile à des services, de l’e-commerce, des promos marketing, des contenus sur mon trajet, des descriptions de monuments… et je peux aussi quitter ma voiture pour louer celle de mon voisin ou la partager en co-voiturage, réserver un Uber, un Vélib, une Auto Lib ou les transports en commun. La data de mobilité est donc devenue la porte d’entrée de la voiture.
Je peux, tel le Guide Michelin, décerner des étoiles à tout ce que je rencontre… partager mon point de vue…

mobility-data

Les constructeurs ont parfaitement compris cette mutation de la création de valeur vers la data  : en 2015, BMW, Audi et Mercedes ont racheté en joint-venture HERE la branche cartographie de Nokia pour créer des services de mobilité. L’idée est de créer un acteur « neutre » de la fourniture de data automobiles et d’établir un contre-standard pour connecter ces applications de services de mobilité avec des données issues des capteurs du véhicule. D’après le Gartner Group, la production de voitures connectées devraient en effet passer de 6,9 millions en 2015 à près de 61 millions en 2020.

Capter la data des usages de mobilité est désormais la porte d’entrée du marché automobile. Cette data permet, en l’exploitant et la combinant, de créer de nouveaux services de mobilité qui à leur tour deviennent des portes d’entrée du marché de la mobilité. Le contrôle de la data est donc déterminant.

Au moment où Amazon détient 30% du cloud mondial – par alliance avec de grands opérateurs de la tech comme Microsoft ou IBM – il est déterminant pour les constructeurs de contrôler l’infrastructure de Data.

Mais une autre disruption technologique non plus exogène et des usages, mais endogène, attendait le monde de l’automobile.

 

Quand la voiture est devenue un téléphone sur roues puis une androïde

Le véhicule connecté, sorte de téléphone sur roues émettant et recevant, connecté aux trillards de données des smartcity (75 % de la population française vit en ville ! ) est donc vital pour l’industrie automobile, non seulement pour ne pas perdre le contact avec ses clients mais aussi pour anticiper ses prévisions, de volumétrie logistique de pièces détachées par exemple.

Les guerres des opérateurs Telco et surtout du Cloud mondial – dont Amazon détient 30% – entraîne les constructeurs automobiles qui s’affrontent désormais avec les géants de la tech pour contrôler le point d’accés à la mobilité, les apps’ de diagnostic et réparation, les services à bord ou sur téléphone… la relation avec le conducteur.

Des écosystèmes de services et de paiements mobiles naissent. Des services collaboratifs entre conducteurs, entre conducteurs et garagistes-réparateurs… des contenus BtoC ou de réparation BtoB…

car-story

 

chiffres-gartner-voitures-connectees

Le véhicule connecté donc… en attendant la généralisation du véhicule autonome qui, lui, analyse via du deep learning et de l’intelligence artificielle les situations observées par des caméras et capteurs et roule sans intervention d’un être humain. Connecté avec d’autres, il développera une intelligence collective de conduite dans le trafic réel capable d’apprendre toutes les situations avec une faculté que ne peut développer aucun être humain. Une genre de « Christine » ce film tiré d’un roman de Stephen King dans lequel une voiture tombe amoureuse d’un ado et tue ses rivales.

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La guerre a donc commencé avec la Google Car, Tesla et autres Data scientists qui se rêvent déjà en manufacturiers automobiles ou mieux : traiter les grands constructeurs mondiaux comme des fournisseurs de premier ou second rang…

 

Amazon et Aliababa, votre garagiste !

Dans la bataille pour la data des usages e-Commerce autour de la voiture Amazon et Alibaba sont les grands leaders.

Aux US, 65% du marché de la pièce détachée en ligne (estimé à 8,9md$) est réalisé par Amazon (25%) et eBay (40%).

En France, 13 à 15 % des pneus, 21% des pièces détachées automobiles sont vendues en ligne (vs. 31 % dans le réseau du constructeur, 22 % dans les centre-autos, 18 % dans un garage indépendant 5 % dans les grandes surfaces).

En Chine on assiste à de réels écosystèmes de services ‘AI & big data powered’ autour de la pièce détachée et plus largement de la mobilité.

  • SAIC Motors, le plus gros fabricant de voitures en Chine, en accord avec Alibaba développe une plate-forme intégrée qui combinerait les services de consommation d’Alibaba et des services liés aux véhicules de SAIC.
  • L’écosystème Didi Chuxing de Jean Liu (Apple, Tencent et Alibaba) évalué à 56 milliards de dollars a vaincu Uber en Chine -. Maintenant Didi Chuxing et son écosystème se tourne vers un empire à sa mesure : la planète !(voir l’excellent article de Wired de ce mois : http://www.wired.co.uk/article/didi-chuxing-china-startups-uber)
  • Il faut dire que les chinois ont une longueur d’avance avec l’intelligence artificielle (AI) en langage naturel qu’ils comptent bien appliquer là aussi.

L’After market est vital pour les constructeurs automobiles car il représente une part importante de leur marge en Europe. Un milieu très éclaté. Les garagistes indépendants représentant environ 60% du marché de l’After Market.

Les réglementations européennes s’aligneront probablement sur celles des US pour pouvoir vendre à peu près n’importe quelle pièce d’origine, ou de MDD, asiatique 30% moins cher.
A partir de votre garage, c’est-à-dire de l’identification de votre véhicule, Amazon vous propose toutes les pièces de votre voiture. Et même les housses d’hiver à sa taille.

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amazon

 

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Mais surtout Amazon a décidé de remonter dans la chaîne du service en fédérant les garagistes indépendants, ce maillon faible est aussi le principal levier de rentabilité des constructeurs automobiles en Europe ou la moitié du parc automobile dépasse les 5 ans d’âge.

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Le jeu est gagnant-gagnant pour Amazon et pour le garagiste qui voit ses réparations augmenter. Mais Amazon peut aussi grâce à Amazon Service proposer que le garagiste vienne chez vous changer vos pneus ou la batterie de madame.

 

Amazon, un redoutable concurrent logistique pour l’industrie automobile

Cette année 2017 a mal commencé pour moi. J’ai été prendre de l’essence et je suis tombé… sur un Amazon locker, ces consignes automatiques permettant aux clients de retirer leurs commandes, et cela dans ma pompe à essence BP où se trouve aussi mon garagiste indépendant… et sous une affiche de ma marque de pneus préférée, comme un pied de nez !

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Amazon n’est pas seulement un danger pour les constructeurs automobiles en terme de e-Commerce de pièces détachées et de services… mais aussi en terme d’efficacité logistique.

La force des constructeurs automobiles par rapport aux réparateurs indépendants ? La logistique, leurs camionnettes passent 7 fois par jour devant certains garages en ville ; et avoir la pièce à temps permet de ne pas immobiliser l’atelier donc de ne pas perdre d’argent. Que fait Amazon ? Il monte un réseau uberisant la logistique last mile avec Flex. Chacun peut exécuter une livraison d’un point à un autre et devenir coursier part time pour une poignée de dollars (18 et 25 dollars de l’heure soit 22,26 euros) avec un statut d’intermittent sans assurance ni protection sociale. Il suffit de ne pas avoir d’antécédents judiciaires. 

Alors Amazon garagiste ? ce n’est pas un rêve mais déjà la réalité. Alibaba de même…

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Imported from Detroit

detroit

Michigan Central Station, Detroit

 

Quand on écoute Beautiful d’Eminem et que l’on regarde l’ancienne gare centrale de Detroit, la Michigan Central Station abandonnée, où le clip a été tourné, on comprend en cinq secondes ce que la désindustrialisation de l’industrie automobile à Detroit a produit sur les bâtiments et sur les âmes :

Eminem sait de quoi il parle, il a vécu toute son adolescence à Detroit. Mais ce qui s’y est passé et que Donald Trump a largement exploité n’est encore rien par rapport ce qui est en train d’arriver avec le Tsunami digital qui va secouer tout le secteur automobile.

 

donald-trump-detroit-speech

Pour finir sur une note positive, je voudrais vous raconter une histoire magnifique. L’histoire de Detroit ne se finit pas avec la crise de l’industrie automobile, des taudis à l’abandon et des homeless.

En 2011, alors que Chrysler était à l’agonie, le directeur marketing, Olivier François eut une dernière idée : demander à Eminem de se produire dans un clip avec la Chrysler 200 pour le super Bowl, la plus grande audience TV de l’année. Et Olivier François voulait montrer que Detroit n’était pas ce qu’on en voyait – des buildings détruits et abandonnés – mais une ville où les gens avaient travaillé dur. Eminem accepta l’idée. Le clip fut diffusé une seule fois, pour 9 millions de dollars, durant l’entracte du Super Bowl. Il exprimait la fierté américaine de la capitale de l’automobile et fit 18 millions de vues sur Youtube.

La musique du clip était celle de Lose Yourself :

Ainsi Fiat-Chrysler a pu reprendre pied sur le marché US et se redresser en cette année. En 2011, les ventes du groupe américain ont augmenté de 26%, 14 points de plus que l’ensemble du marché, les ventes de la Jeep Cherokee avaient, elles, doublé.

chrysler-300c-ad-with-eminem-2

« Là ou grandit le péril croît aussi ce qui sauve » disait le poète Hölderlin. Peu de marchands de calèches sont devenus des constructeurs automobiles. Les oubliés de la globalisation seront aussi probablement ceux qui lui rendront son âme.

Nous ne savons pas encore quel sera ce monde de la mobilité dont la porte d’entrée est la relation et les services via la data.

Pour les constructeurs ou les pneumaticiens, il est clair que les vieilles recettes et les fournisseurs habituels ont cessé d’être des gages d’avenir, que l’avenir et ceux qui le portent font peur. C’est d’abord une question de mindset et d’expérience. Mais il faut être humble et savoir saisir son heure, son opportunité, comme l’a fait Chrysler.

Nous pouvons faire du monde la voiture digitalisée un monde humain mais il s’agira d’un tout autre monde. Il suffit de le vouloir.

 

« Look, if you had one shot, one opportunity »

C’est mon message.

Look, if you had one shot, one opportunity | Hey, si tu avais une chance, une opportunité
To seize everything you ever wanted, in one moment  | De saisir tout ce que tu as toujours voulu, en un instant
Would you capture it or just let it slip ? | La saisirais-tu ou la laisserais-tu passer ?

Eminem

 

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Didier Long, co-fondateur de Kea-Euclyd

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Michelin, le second manufacturier mondial de pneumatiques, né à Clermont-Ferrand en 1889 a eu dés le début une excellente idée : non seulement fabriquer des pneus de très haute innovation (invention du pneu radial, du pneu vert…) mais aussi se mettre dès ses débuts en 1900 entre l’automobiliste et la route via ses usages.

 

Cette obsession des usages de l’automobiliste s’est concrétisée par le guide rouge, sorte de manuel de la route, avec les meilleurs restaurants 3 étoiles le long du chemin (les fameuses étoiles Michelin), un rating des données et des usages… un siècle avant le Big Data… 35 millions d’exemplaires vendus, l’un des plus anciens et des plus prestigieux guides gastronomiques du monde.
UN guide mais aussi des cartes MICHELIN pour les vacances et les VRP,  avec des cartes pro pour tout réseau (exemple : EDF / photo), , et même les panneaux et les bornes MICHELIN sur toutes les routes de France.
Michelin n’était donc, non pas une manufacture de pneus à Clermont-Ferrand, mais une sorte de guide et de point d’entrée de la mobilité redescendant dans la chaîne de la valeur au plus près des usages clients, à partir de la production.

 

Google, porte d’entrée des usages et de la data de mobilité

Le problème pour les manufacturiers de pneus, de pièces détachées, ou les constructeurs automobiles c’est que Google a eu la même idée que Michelin. Toutes les grandes firmes mondiales de l’automobile se sont concentrées sur l’innovation, le marketing, la vente de produits… et les GAFA sont arrivés dans ce jeu en se concentrant non pas sur le produit mais sur les clients et leurs usages. Non seulement Google Map part de l’usage de la mobilité mais Android Auto, de la même firme, aussi.
François Michelin répétait toujours : « Le client a toujours raison ». La première valeur de Jeff Bezos est la même : « Client Obsession ». Ce dont Michelin rêvait avec ses cartes et les usages de mobilité, Google l’a fait.

 

La disruption des Data Mega Players

Avec Android auto qui cumule et analyse mes données, j’accède en recherche vocale tactile à des services, de l’e-commerce, des promos marketing, des contenus sur mon trajet, des descriptions de monuments… et je peux aussi quitter ma voiture pour louer celle de mon voisin ou la partager en co-voiturage, réserver un Uber, un Vélib, une Auto Lib ou les transports en commun. La data de mobilité est donc devenue la porte d’entrée de la voiture.
Je peux, tel le Guide Michelin, décerner des étoiles à tout ce que je rencontre… partager mon point de vue…

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Les constructeurs ont parfaitement compris cette mutation de la création de valeur vers la data  : en 2015, BMW, Audi et Mercedes ont racheté en joint-venture HERE la branche cartographie de Nokia pour créer des services de mobilité. L’idée est de créer un acteur « neutre » de la fourniture de data automobiles et d’établir un contre-standard pour connecter ces applications de services de mobilité avec des données issues des capteurs du véhicule. D’après le Gartner Group, la production de voitures connectées devraient en effet passer de 6,9 millions en 2015 à près de 61 millions en 2020.

Capter la data des usages de mobilité est désormais la porte d’entrée du marché automobile. Cette data permet, en l’exploitant et la combinant, de créer de nouveaux services de mobilité qui à leur tour deviennent des portes d’entrée du marché de la mobilité. Le contrôle de la data est donc déterminant.

Au moment où Amazon détient 30% du cloud mondial – par alliance avec de grands opérateurs de la tech comme Microsoft ou IBM – il est déterminant pour les constructeurs de contrôler l’infrastructure de Data.

Mais une autre disruption technologique non plus exogène et des usages, mais endogène, attendait le monde de l’automobile.

 

Quand la voiture est devenue un téléphone sur roues puis une androïde

Le véhicule connecté, sorte de téléphone sur roues émettant et recevant, connecté aux trillards de données des smartcity (75 % de la population française vit en ville ! ) est donc vital pour l’industrie automobile, non seulement pour ne pas perdre le contact avec ses clients mais aussi pour anticiper ses prévisions, de volumétrie logistique de pièces détachées par exemple.

Les guerres des opérateurs Telco et surtout du Cloud mondial – dont Amazon détient 30% – entraîne les constructeurs automobiles qui s’affrontent désormais avec les géants de la tech pour contrôler le point d’accés à la mobilité, les apps’ de diagnostic et réparation, les services à bord ou sur téléphone… la relation avec le conducteur.

Des écosystèmes de services et de paiements mobiles naissent. Des services collaboratifs entre conducteurs, entre conducteurs et garagistes-réparateurs… des contenus BtoC ou de réparation BtoB…

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Le véhicule connecté donc… en attendant la généralisation du véhicule autonome qui, lui, analyse via du deep learning et de l’intelligence artificielle les situations observées par des caméras et capteurs et roule sans intervention d’un être humain. Connecté avec d’autres, il développera une intelligence collective de conduite dans le trafic réel capable d’apprendre toutes les situations avec une faculté que ne peut développer aucun être humain. Une genre de « Christine » ce film tiré d’un roman de Stephen King dans lequel une voiture tombe amoureuse d’un ado et tue ses rivales.

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La guerre a donc commencé avec la Google Car, Tesla et autres Data scientists qui se rêvent déjà en manufacturiers automobiles ou mieux : traiter les grands constructeurs mondiaux comme des fournisseurs de premier ou second rang…

 

Amazon et Aliababa, votre garagiste !

Dans la bataille pour la data des usages e-Commerce autour de la voiture Amazon et Alibaba sont les grands leaders.
Il faut savoir que 13 à 15 % des pneus sont déjà vendus en ligne en France. Nous estimons le chiffre d’affaires réalisé par Amazon sur le pneu a environ 25% de celui de Michelin dans le monde.
L’After market est vital pour les constructeurs automobiles car il représente une part importante de leur marge. Un milieu très éclaté. Les garagistes indépendants représentent 60% du marché de l’After Market.

Le e-commerce représente 12 % du marché de la distribution de pièces de rechange en Europe. Amazon et eBay réaliseraient environ 70% des ventes du marché US des pneus et pièces détachées.
Les réglementations européennes s’aligneront probablement sur celles des US pour pouvoir vendre à peu près n’importe quelle pièce d’origine, ou de MDD, asiatique 30% moins cher.
A partir de votre garage, c’est-à-dire de l’identification de votre véhicule, Amazon vous propose toutes les pièces de votre voiture. Et même les housses d’hiver à sa taille.

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amazon

 

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Mais surtout Amazon a décidé de remonter dans la chaîne du service en fédérant les garagistes indépendants, ce maillon faible est aussi le principal levier de rentabilité des constructeurs automobiles en Europe ou la moitié du parc automobile dépasse les 5 ans d’âge.

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capture5

Le jeu est gagnant-gagnant pour Amazon et pour le garagiste qui voit ses réparations augmenter. Mais Amazon peut aussi grâce à Amazon Service proposer que le garagiste vienne chez vous changer vos pneus ou la batterie de madame.

 

Amazon, un redoutable concurrent logistique pour l’industrie automobile

Cette année 2017 a mal commencé pour moi. J’ai été prendre de l’essence et je suis tombé… sur un Amazon locker, ces consignes automatiques permettant aux clients de retirer leurs commandes, et cela dans ma pompe à essence BP où se trouve aussi mon garagiste indépendant… et sous une affiche de ma marque de pneus préférée, comme un pied de nez !

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Amazon n’est pas seulement un danger pour les constructeurs automobiles en terme de e-Commerce de pièces détachées et de services… mais aussi en terme d’efficacité logistique.

La force des constructeurs automobiles par rapport aux réparateurs indépendants ? La logistique, leurs camionnettes passent 7 fois par jour devant certains garages en ville ; et avoir la pièce à temps permet de ne pas immobiliser l’atelier donc de ne pas perdre d’argent. Que fait Amazon ? Il monte un réseau uberisant la logistique last mile avec Flex. Chacun peut exécuter une livraison d’un point à un autre et devenir coursier part time pour une poignée de dollars (18 et 25 dollars de l’heure soit 22,26 euros) avec un statut d’intermittent sans assurance ni protection sociale. Il suffit de ne pas avoir d’antécédents judiciaires. 

Alors Amazon garagiste ? ce n’est pas un rêve mais déjà la réalité. Alibaba de même…

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Imported from Detroit

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Michigan Central Station, Detroit

 

Quand on écoute Beautiful d’Eminem et que l’on regarde l’ancienne gare centrale de Detroit, la Michigan Central Station abandonnée, où le clip a été tourné, on comprend en cinq secondes ce que la désindustrialisation de l’industrie automobile à Detroit a produit sur les bâtiments et sur les âmes :

Eminem sait de quoi il parle, il a vécu toute son adolescence à Detroit. Mais ce qui s’y est passé et que Donald Trump a largement exploité n’est encore rien par rapport ce qui est en train d’arriver avec le Tsunami digital qui va secouer tout le secteur automobile.

 

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Pour finir sur une note positive, je voudrais vous raconter une histoire magnifique. L’histoire de Detroit ne se finit pas avec la crise de l’industrie automobile, des taudis à l’abandon et des homeless.

En 2011, alors que Chrysler était à l’agonie, le directeur marketing, Olivier François eut une dernière idée : demander à Eminem de se produire dans un clip avec la Chrysler 200 pour le super Bowl, la plus grande audience TV de l’année. Et Olivier François voulait montrer que Detroit n’était pas ce qu’on en voyait – des buildings détruits et abandonnés – mais une ville où les gens avaient travaillé dur. Eminem accepta l’idée. Le clip fut diffusé une seule fois, pour 9 millions de dollars, durant l’entracte du Super Bowl. Il exprimait la fierté américaine de la capitale de l’automobile et fit 18 millions de vues sur Youtube.

La musique du clip était celle de Lose Yourself :

Ainsi Fiat-Chrysler a pu reprendre pied sur le marché US et se redresser en cette année. En 2011, les ventes du groupe américain ont augmenté de 26%, 14 points de plus que l’ensemble du marché, les ventes de la Jeep Cherokee avaient, elles, doublé.

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« Là ou grandit le péril croît aussi ce qui sauve » disait le poète Hölderlin. Peu de marchands de calèches sont devenus des constructeurs automobiles. Les oubliés de la globalisation seront aussi probablement ceux qui lui rendront son âme.

Nous ne savons pas encore quel sera ce monde de la mobilité dont la porte d’entrée est la relation et les services via la data.

Pour les constructeurs ou les pneumaticiens, il est clair que les vieilles recettes et les fournisseurs habituels ont cessé d’être des gages d’avenir, que l’avenir et ceux qui le portent font peur. C’est d’abord une question de mindset et d’expérience. Mais il faut être humble et savoir saisir son heure, son opportunité, comme l’a fait Chrysler.

Nous pouvons faire du monde la voiture digitalisée un monde humain mais il s’agira d’un tout autre monde. Il suffit de le vouloir.

 

« Look, if you had one shot, one opportunity »

C’est mon message.

Look, if you had one shot, one opportunity | Hey, si tu avais une chance, une opportunité
To seize everything you ever wanted, in one moment  | De saisir tout ce que tu as toujours voulu, en un instant
Would you capture it or just let it slip ? | La saisirais-tu ou la laisserais-tu passer ?

Eminem